Avec son roman Le grand cahier, Agota Kristof s’inscrit dans le style de la post-modernité en abordant le thème de la quête d’identité. La deuxième guerre mondiale, atrocement violente, amène chez chacun un instinct de protection, de survie qui s’étend d’un bout à l’autre des villes et villages. À cause de cette peur partagée par tous, chacun veut s’endurcir, se protéger. Les citoyens s’exilent dans leurs demeures, le sentiment de confiance entre voisins se perd, tous sont méfiants. Chacun reste chez soi et lentement, l’instinct de survie, presque animal, fait surface. Par exemple, la grand-mère refuse de se laver, d’aider, ou simplement d’accueillir ses petits-fils. Pour s’abriter, la voisine feint d’être aveugle et sourde. Les exercices des jumeaux sont leur technique personnelle d’endurcissement mental comme physique, pour devenir insensibles face à l’horreur à laquelle ils sont témoins. «Nous ne voulons plus rougir ni trembler, nous voulons nous habituer aux injures, aux mots qui blessent.» (p.26) Donc, par l’atrocité de la guerre, et par le besoin de s’endurcir que vivent les personnages, ils finissent tous terriblement solitaires. Chacun des personnages, de Bec-de-Lièvre aux jumeaux, sont laissés à eux-mêmes. Seul face à la violence s’acharnant sur le pays, chaque individu se voit développer des comportements peu communs pour affronter leur solitude. Dès le début lorsque les jumeaux arrive chez leur grand-mère, qui est la plus seule de tous, ce climat d’individualisme et d’égoïsme est ressenti. Cette solitude, vécu par chaque personnage d’une facon différente mais bien intense, est perceptible tout au long du roman. Bec-de-lièvre, elle, vit sa solitude en développant une sexualité maladive: «Il n’y a que les bêtes qui m’aiment.»(p.40) Dans la situation horrible et inhumaine qu’est la guerre, les personnages de ce récit cherchent à se protéger eux-mêmes ce qui résulte en la solitude totale de chacun.
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